Pourquoi j’ai banni le noir et blanc numérique ?

Ilford XP2 développement noir et blanc argentique Lille
Ilford XP2

J’ai banni le noir et blanc numérique de ma production photographique. Ce n’est ni un caprice ni la volonté de faire le buzz. Lui et moi ne sommes pas sur la même longueur d’onde. Les rares photographies que j’ai accepté de convertir en noir et blanc numérique à la demande d’un client m’ont déçu. Je n’ai pas la fibre du plugin ou mon expérience argentique fait blocage. J’ai essayé mais cela ne marche pas, en tout cas pas pour moi. Pourtant, je vois des choses intéressantes en numérique chez mes confrères. J’ai relevé de beaux portfolios encore cette semaine. Celui de Jone Reed m’a beaucoup plu. Je l’ai trouvé différent. Sa série Black/White m’a fait oublier qu’il s’agissait de numérique. Le noir et blanc est agréable. Peut-être aussi parce que les photos sont intéressantes et parfois intrigantes. 

Transformer une image couleur en noir et blanc devant un écran ne m’enthousiasme pas en fin de compte. J’ai voulu faire comme tout le monde. L’idée de réduire les coûts et de rationaliser le travail encore plus m’avait traversé l’esprit, c’est vrai. Mais maintenant, je sais que bricoler un simili noir et blanc ne me convient pas. J’ai donc pris une décision radicale : bannir le noir et blanc numérique à tout jamais. Les photographies noir et blanc seront systématiquement produites en argentique. Lors des dernières signatures de contrat, les clients ont bien compris ma démarche. Après, le noir et blanc n’est pas une priorité pour tous.

portrait mariée noir et blanc retro Ilford HP5 1600

Je m’attend tout de même à des réactions hostiles. Il y aura toujours une critique par ici ou par là. Certains diront que c’est dans ma tête que c’est du snobisme. D’autres se vanteront d’obtenir de belles nuances en jouant sur tel ou tel curseur, mais je m’en fiche. C’est mon choix. Un jour ou l’autre, un client me réclamera une « monochromisation » d’une partie des photos numériques déjà livrées. Pour le profane, un clic ou deux devraient suffire. Il faudra expliquer mes raisons. Je refuserai toute conversion en noir et blanc après un reportage mariage par exemple. Les futurs mariés qui souhaitent des photos noir et blanc devront choisir l’option argentique, au risque de ne pas plaire à tout le monde.

Je pense que les habitués du blog ne s’étonneront pas de ma décision. Je tourne autour du pot depuis trop longtemps. Après avoir essayé de nouveaux équipements numériques et tenté l’approche logicielle, je n’ai jamais été vraiment conquis. Lorsque je photographie pour moi, le négatif passe toujours avant le numérique. L’argentique n’est pas meilleur ou plus qualitatif que le numérique. C’est une question de plaisir. Basculer un fichier numérique en noir et blanc n’est pas compliqué mais le résultat ne me plaît absolument pas. Quelque soit le logiciel ou la technique employé, le rendu numérique ne vaut pas celui d’une pellicule. Le noir et blanc argentique reste unique. J’aime le grain et la richesse des nuances de gris d’une pellicule Kodak ou d’une Ilford. Le rendu très particulier du noir et blanc argentique est dû en grande partie à l’émulsion elle-même. La qualité du développement joue un rôle dans le rendu final mais tout est déjà inscrit sur le film. Il ne me reste plus grand chose à faire après ça.

Parfois, on me félicite sur la qualité de mes photos noir et blanc. Mais je n’y suis pour rien. J’ai confiance en mon matériel et j’utilise les meilleures pellicules noir et blanc du marché. En argentique, nul besoin d’un doctorat si on veut un beau cliché en noir et blanc. L’affaire est bien plus complexe en numérique. Les rendus sont inégaux d’un boîtier à l’autre. Les surexpositions et sous-expositions ne facilitent pas toujours le travail de post-production. Non, c’est compliqué. Je n’ai plus envie de grogner tous les dimanche matin devant mon écran parce que je suis incapable de retrouver le style de noir et blanc que j’aime. À bon entendeur …

Photographe mariage à Lille spécialisé noir et blanc argentique.

21 commentaires sur “Pourquoi j’ai banni le noir et blanc numérique ?

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  1. Fred, j’aime ta saine colère ! La colère, c’est une soupape de sécurité. Il faut que ça pète de temps en temps ! C’est sain et c’est fait pour ça.
    Pourtant, tu travailles plus en couleur qu’en noir et blanc ? Quand je vois les difficultés qu’ont des copains pour réussir à obtenir des couleurs intéressantes en numérique… Le N/B est un moindre mal.
    Bien sûr que les N/B numériques sont charbonneux et sales, qu’ils « bavent ». Et quand tu fais des tirages par projection d’encre, tu touches le fond. Y compris pour de grandes expos (Willy Ronis).
    C’est normal que ce ne soit pas parfait : c’est pas fait pour ça ! Ils n’ont pas pensé à la qualité d’abord. Alors ils proposent moyennant finance, merci Apple, des substituts, des produits cosmétiques de remplacement. Leica a même jugé qu’un Monochrome serait nécessaire pour limiter les dégâts !
    Sois tranquille, tes clients comprendront très vite et très bien ce que tu veux dire. En plus, ça leur rappellera « le bon vieux temps ».

    1. Merci Patrice. J’essaie de ne froisser personne. Ceci est un point de vue personnel. La problématique du noir et blanc est la mienne. Je sais que certains de mes confrères livrent la totalité des fichiers numériques en couleur et en noir et blanc. C’est peut-être une façon de se simplifier la vie. J’ai aussi des clients qui ne ressentent pas le besoin d’avoir leurs photos de mariage en noir et blanc. Pas de souci, le numérique est parfait en reportage. A bientôt Patrice.

  2. Salut Fred.
    Tu me surprends en disant que tu n’y es pour rien quand des gens te félicitent pour la qualité de tes photos noir & blanc.
    Je pense au contraire que tu y es pour beaucoup, parce que simplement tu fais des choix dictés par ton expérience et ta sensibilité.
    C’est bien toi qui choisit le trio boitier/objectif/film.
    On ne peut plaire à tout le monde. Tes choix forment ta personnalité et c’est pour ta personnalité que des clients te choisissent.
    Donc, bravo et bonne continuation.
    Pour le qu’en dira-t-on, « les chiens aboient, la caravane passe ».

    1. Merci Olivier pour ton soutien. Effectivement, la réussite d’une photo dépend des choix du photographe. Mais la qualité du noir et blanc s’explique surtout par le support, autrement le film. En numérique, c’est l’opérateur devant son ordinateur qui dicte la qualité du monochrome. Bon dimanche Olivier.

    1. Oui c’est vrai. C’est peut-être le seul compact que je prendrais en balade. Le Leica Monochrome aussi mais là on entre dans un autre domaine. J’aimais bien aussi le rendu des Olympus et Fuji.

  3. J’ai lu avec intérêt votre post. Comme c’est dommage de ne pas exploiter les possibilités sans fin du passage en noir et blanc à partir d’un fichier numérique. Les outils de Photoshop permettent de travailler chaque couche avec beaucoup de finesse et de tester des rendus très différents. Je n’ai aucune nostalgie des films, je trouve mes noir et blanc beaucoup plus beaux aujourd’hui. Néanmoins je comprends votre attachement au grain et au rendu du film.
    Avez-vous testé le Leica M monochromatique ?

    1. Merci d’avoir pris la peine d’intervenir Sébastien. Côté logiciel, j’ai tout essayé. Déjà en 2002, avec l’arrivée du reflex numérique dans mon sac photo, j’essayais de jouer avec les calques Photoshop afin d’équilibrer le monochrome. Les logiciels comme DXO ou Silver Efex Pro ne m’ont pas convaincu. Les plugins Mastin labs et Cie n’ont jamais su faire naître un véritable beau noir et blanc non plus. Je pense que le manque de subtilité dans les nuances vient de la nature même du fichier numérique. Certains photographes arrivent à produire un monochrome intéressant mais pour l’instant il n’y a rien de plus beau qu’un noir et blanc argentique. L’argentique reste inimitable. Quant au Leica M, il est hors de prix.

  4. bonjour
    J’apprécie votre conviction pour le Noir et Blanc argentique , disons que c’est un peu le Vinyl versus CD . L’immédiateté du numérique est à l’image d’une société qui ne supporte pas le lenteur et le mystère qui se dévoile . beaucoup de photographes plébiscitent le N&B numérique, Philippe Bachelier conseille de photographier en mode N&B sur le boitier évitant ainsi la conversion .
    Personnellement, j’utilise argentique et numérique et je pense que c’est une attitude générationnelle. Je ne développe pas mes pellicules argentiques mais je les scanne et les imprime ensuite après les avoir numérisées .J’aime beaucoup le noir et blanc en argentique même numérisé ( en dépit du fait que c’est un ersatz pour les puristes. J’utilise donc les deux moyens car pour moi l’argentique est plus poétique que le numérique mais lui aussi a sa praticien étonnante .
    Merci pour votre partage simple et instructif sur le photo argentique , continuez !

    1. Salut Fred Je ne veux pas apporter de commentaires complémentaire à ceux du jour. En ce qui me concerne, je suis depuis le début de cette aventure commerciale qu’est le numérique, très radical et je n’en démord pas : le numérique est à la photo de qualité ce que William Saurin est au cassoulet ! A bon entendeur. Patrice

  5. J’ai lu un article très intéressant sur le noir et blanc numérique. Un photographe professionnel dit que, dans 90% des cas, une conversion d’une photo numérique couleur vers le noir et blanc ne donnera pas de résultats extraordinaires. Il faut penser la photo en noir et blanc dès le départ et avoir de ce fait l’expérience permettant de voir en noir et blanc. Pour avoir des photos de qualité en noir et blanc numérique, il faut paramétrer l’appareil pour le noir et blanc. J’ai un petit Samsung EX1 de 10 MPixels que je n’utilise qu’en noir et blanc et jpg. C’est intéressant d’avoir la prévisualisation sur l’écran. Il m’arrive aussi de paramétrer le Fuji XPro2 pour le noir et blanc avec de bons résultats et là je prends en jpg et raw.
    J’aime beaucoup l’argentique, et en particulier le rendu des Kodak Tri-X et T-Max, deux pellicules aux rendus et aux caractères différents.
    Bonne continuation Fred. 🙂

    1. Salut Olivier. Ah justement, si je voulais refaire du monochrome numérique, je me dirigerais vers un Olympus Pen ou un Fuj XPro2 ou XPro3. Je trouve que leurs capteurs sont plus prédisposés au monochrome que les reflex standards. Je me trompe peut-être mais c’est mon ressenti. Après, quand on enregistre ses images en RAW les préréglages comptent peu puisque l’on peut tout reprendre à Zero dans Capture One ou LR. Non, ce qui compte, c’est la manière d’exposer au moment de la prise de vue et en général, une bonne sous-ex donne de bons résultats en monochrome. J’avais été convaincu par le petit DP1 Merrill lorsque la société Sigma m’avait demandé de le tester. J’ai trouvé que la conversion était immédiatement parlante et surprenante grâce à son capteur Foveon. Quand on parle de « voir en noir et blanc », beaucoup s’égarent. En fait, c’est la scène qui se prête plus ou moins au noir et blanc. Tout dépendra des contrastes, de la rythmique des lignes et des formes. Mais si on shoote en Jpeg alors oui, il vaut mieux préparer ses réglages en fonction avec éventuellement un filtre pour renforcer les contrastes. C’est d’ailleurs de cette manière, comme tu le fais toi, que je conçois le monochrome numérique. Un résultat immédiat que l’on ne retouche que très peu ensuite. Mais bon, il faut encore en avoir le temps. Merci pour ton intervention Olivier !

      1. Re salut, Autre chose qui en dit beaucoup sur les capacités de certains « photographes » : les automatismes qui donnent n’importe quel réglage. Ainsi, on trouve des photos faites au 2000 eme à F2 et à 4000 Iso ! Des réglages qu’aucun photographe digne de ce nom n’utiliserait. La sensibilité monte et le diaphragme reste grand ouvert pour des vitesses qu’on pourrait utiliser plus basses et des diaphragmes mieux choisis pour leur qualité optique ou la profondeur de champ€¦ Compte tenu du « bruit » que ça génère dans les images, c’est de la pâté pour les chats ! Un photographe préfèrera toujours descendre les vitesses et la sensibilité au profit d’un bon diaphragme. Je me marre de voir tout ça ! P.

        1. Effectivement, le numérique, c’est tellement facile. La montée en ISO ne fait plus peur et tant mieux si on a du bruit, on simule le grain ( enfin on croit pouvoir le faire ). Et il n’y a rien de plus jouissif que de tout photographier à pleine ouverture. C’est la nouvelle école : place au bokeh !!

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