J’avais choisi cet endroit pour son côté symbolique. Nous sommes ici à la frontière entre la France et la Belgique, maintenant invisible et symbolisée par ce pont en métal. Je me suis posté là, à l’affût du moindre passant. J’ai patienté un long moment avant de me décider à déclencher. J’étais en argentique et je préférais attendre plutôt que de gâcher… Je voulais rendre ce lieu plus intéressant et moins vide. J’espérais par exemple le passage d’un vieux monsieur courbé sur un vélo qui a bien vécu ou une jeune femme vêtue d’un long manteau noir et d’un chapeau lui couvrant la moitié du visage, le regard baissé.
On peut imaginer bien des scénarios, mais en réalité rien ne se passe comme on le voudrait. J’aurais mieux fait de changer d’endroit.
La photographie, c’est une question de patience mais aussi de chance.
Oui mais cette photo est bien aussi comme ça, ça laisse la place à de la rêverie et les pavés qui ont vécu au premier plan parlent autant qu’un vieux monsieur courbé sur son vélo.
Certains photographes auraient réalisé une mise en scène en amenant le monsieur et son vélo. L’image aurait pu être tout aussi parlante. Mais c’est tellement plus motivant pour un photographe la patience, la confiance et le hasard, je vous suis à 100%.